Doit-il y avoir un Etat Juif?

Par John Spritzler

[newdemocracyworld.org]

Traduit de New Democracy Newsletter, Mai-Aout 2002.

Le show de Ted Koppel sur ABC-TV Nightline (USA) du 28 avril 2002 mettait en avant la question "Est-il antisémite de critiquer la politique Israélienne envers les Palestiniens?" Koppel interviewait le chef de la "Jewish Anti-Defameation League" qui répondit qu'Israël est un Etat souverain et que bien sûr il est permis de critiquer sa politique. Mais, prévint-il, s'opposer à l'idée d'un Etat Juif dépassait les limites et était du pur antisémitisme. Koppel sourit complaisamment et ne donna aucune indication qu'une personne raisonnable pourrait désapprouver. L'idée d'un Etat Juif (dont les partisans s'appellent eux-mêmes "Sionistes") est sacro-sainte dans les médias grand-public américains, qui font silence sur les questions troublantes posées par le débat, en particulier que de nombreux juifs se sont historiquement opposés à l'idée d'un Etat Juif. L'établissement d'Israël a été bien plus controversé parmi les Juifs que la plupart des américains n'en sont conscients. Les opposants juifs à un Etat Juif croyaient en une démocratie avec des droits égaux pour juifs et non-juifs, et pensaient qu'une souveraineté purement juive serait un désastre pour les juifs ordinaires.

L'Etat d'Apartheid

Qu'y a t'il de juif dans l'Etat Juif d'Israël? Ce n'est pas qu'Israël soit un Etat où seuls des juifs vivent. Un cinquième de la population Israélienne est non juive. (1). La judaïté d'Israël est inscrite dans un corps de lois qui confèrent des droits et des avantages aux juifs et pas aux autres. Si ce n'était pas vrai, Israël ne mériterait pas d'être appelé un Etat Juif. Mais parce que c'est vrai, juifs et non-juifs ne sont pas égaux devant la loi en Israël. La Déclaration de l'Etablissement de l'Etat d'Israël, déclaration d'indépendance d'Israël, signé le 14 mai 1948, est un document de deux pages qui définit clairement Israël comme Etat Juif. Ce document souligne que l'autorité souveraine en Israël est le peuple juif: "Ce droit est le droit naturel des [du peuple des] juifs d'être maîtres de leur propre destin, comme toutes les autres nations, dans leur Etat souverain." Des phrases renforcent ce point de manière répétée : "peuple juifY Y dans son propre pays," "peuple juif pour reconstruire son foyer national," "Etat Juif", "doit du peuple juif à établir son Etat," "peuple juif dans l'érection de son Etat," "peuple juif souverain."

Où ceci laisse t'il les Arabes, qui sont à présent 20% de la population en Israël (sans compter la bande de Gaza et la Cisjordanie)? La Déclaration fait une distinction claire en juifs qui sont l'autorité souveraine en Israël, et en habitants arabes qui ne le sont pas. Le statut de second rang des arabes en Israël est renforcé par des lois qui privilégient les juifs plutôt que par un refus formel de citoyenneté, de droit de vote et d'entreprise pour les arabes. Ainsi le document dit que les arabes auront "complète égalité des droits sociaux et politiques" et "citoyenneté complète et égale et juste représentation dans toutes les institutions [d'Israël] provisoires ou permanentes." Mais la Loi du Retour, passée en 1950, débute par: "Chaque juif a le droit d'immigrer dans le pays." Mais un des griefs centraux des Palestiniens est qu'ils ne peuvent pas en faire autant; ils ne peuvent pas retourner dans leurs foyers séculaires en Israël. Même les arabes qui n'ont jamais quitté Israël, mais qui sont seulement restés quelques jours chez des connaissances dans un village voisin en attendant la fin de la guerre de 1948, sont classés maintenant en Israël "présents absents," une catégorie dans laquelle ils sont mis pour toujours, et en vertu de laquelle leurs maisons et propriétés restent en possession du Conservatoire des Propriétés des Absents, qui met ces propriétés à la disposition des juifs. [1].

Des organisations privées ne servant que les intérêts juifs ont un statut quasi-gouvernemental en Israël pour mener des politiques qui affectent les non-juifs. Le principal exemple en est l'Agence Juive, qui s'intitule "l'agence pour les intérêts juifs en Eretz ["la terre de"] Israël...[son] rôle est défini...comme organisation philanthropique de volontaires pour l'immigration, l'installation et le développement, et la coordination de l'unité du peuple Juif."[2] Le Centre des Affaires Publiques (juives) de Jérusalem décrit l'Agence Juive comme "une institution de volontaires, quasi-publique, partageant beaucoup de fonctions juridictionnelles, souvent chevauchantes, avec le gouvernement." [3] Oui, les arabes pourraient créer une "Agence Arabe" privée mais elle n'aurait pas le pouvoir quasi-gouvernemental de disposer, par exemple, de disposer de la propriété juive de la manière dont la loi permet à l'Agence Juive de disposer de la propriété arabe: le Conservatoire des Propriétés des Absents, étatique, confie à l'Agence Juive la propriété arabe, mais ne confie aucune propriété juive à aucune agence arabe. La propriété des juifs n'est pas confisquée comme "présents absents" parce que les juifs, contrairement aux arabes, bénéficient du "Droit au retour".

Extrait de la "Lettre à un déporté"

"Pendant vingt ans, je n'ai rien su du problème Palestinien. J'avais un an quand mes parents sont arrivés parmi 50.000 juifs Bulgares qui décidèrent d'immigrer dans le nouvel Etat Juif. C'était en 1948 quand Israël venait de naître. Nous nous sommes établis à Ramle, dans une grande maison en pierre qui avait appartenu à une famille arabe...derrière la maison il y avait un citronnier, qui croulait chaque année sous le poids de ses fruits...Un matin, juste après la guerre des six jours, un jeune arabe s'est présenté à la porte d'entrée. Il a dit : "Mon nom est Bachir el-Kheiri. Cette maison appartenait à ma famille." Il avait 26 ans. J'en avais 20. C'était la première fois que je rencontrais un Palestinien.

Un jour -- jamais je ne l'oublierai -- le frère de Bachir est venu à Ramle avec son père. Le vieil homme était aveugle. Ayant franchi la grille, il a caressé les pierres taillées de la maison. Puis il a demandé si le citronnier était toujours là. On l'a conduit dans la cour arrière. Quand il a mis les mains sur le tronc de l'arbre qu'il avait planté, il n'a pas dit un mot. Les larmes coulaient sur ses joues. Mon père lui a donné un citron. Il le serrait dans ses mains en partant. La mère de Bachir m'a dit, des années plus tard, que quand son mari ne pouvait pas dormir, il avait l'habitude de parcourir leur appartement en tenant un vieux citron ratatiné dans sa main. Mon père lui avait donné le même citron...

J'avais toujours cru que les arabes de Ramle et de Lod avaient fui devant les soldats Israéliens en 1948, qu'ils avaient abandonné leur maison comme des peureux...Après la guerre de 1967, un Israélien qui avait participé à l'expulsion de Lod et de Ramle m'a dit ce qui s'était vraiment passé en juillet 1948. Il m'a parlé des voitures avec des haut-parleurs circulant dans Ramle, ordonnant aux habitants de partir. Je n'ai pas cessé d'aimer mon pays pour cela, mais mon amour a perdu son innocence." [3b]

La Commission de Conciliation de l'ONU a estimé que près de 80% de la terre constituant Israël aujourd'hui est propriété possédée originellement par les Palestiniens qui a été confisquée par les organisations juives telles que l'Agence Juive [4] Les Palestiniens se voient interdits de la posséder par la loi israélienne. De toute la terre qui peut être légalement vendue en Israël, 67% ne peut pas être vendus légalement à des arabes, tandis qu'aucune terre ne peut pas être vendue à des juifs. [5] Ainsi, si des Palestiniens peuvent être citoyens en Israël, ils sont citoyens de deuxième classe, et c'est précisément ce que veut dire vivre dans un "Etat Juif" quand on n'est pas juif. Et une autre caractéristique d'Israël qui en fait un Etat d'Apartheid, c'est qu'il vise à séparer les juifs des arabes au niveau personnel. Par exemple, juifs et arabes ne peuvent pas se marier entre eux légalement en Israël, de tels mariages, s'ils ont lieu hors du pays, ne sont pas reconnus par la loi israélienne.

On peut être pour un Etat juif ou pour l'égalité complète entre juifs et non-juifs dans Israël, mais on ne peut pas logiquement être pour les deux. Les leaders sionistes utilisent cette logique comme une arme contre les gens (juifs et non juifs pareil) qui veulent l'égalité et la démocratie en Israël. Si vous dites que vous voulez qu'Israël soit un vrai Etat démocratique dans lequel juifs et non-juifs aient des droits égaux, les sionistes vous accusent de vouloir détruire l'Etat d'Israël, parce qu'Israël est un Etat juif, pas un Etat de "tous ceux qui vivent ici". Les sionistes ont fait de "soutenir l'existence d'Israël" (en tant qu'Etat juif) un test de dépistage ; quiconque le rate est qualifié soit d'antisémite, soit de juif avec la "haine de soi." Ceci met sur la défensive toute personne qui croit dans les notions universelles d'égalité, et étouffe la libre expression des points de vue appelant à la solidarité entre juifs et arabes.

Israël est très différent de quasiment tous les autres Etats actuels. Si vous êtes Franççais ou Etasunien ou Chinois ou Nigérien et que vous dites que vous voulez que votre nation soit une nation où tout le monde est égal devant la loi et où tous constituent collectivement la plus haute autorité du pays, personne ne vous accuse de vouloir abolir la France, les USA ou quoi que ce soit. C'est parce que, aussi peu démocratiques et discriminatoires les gouvernements soient t'ils, ils justifient leur existence en proclamant être des Etats reposant sur l'assentiment de tous leurs habitants. Nuls de ceux, par exemple, qui s'opposèrent à Jim Crow [figure caricaturale de l'Afro-américain avant et pendant les décennies de la ségrégation, ici opposition aux lois racistes, ndt] aux USA ne fut jamais accusé de vouloir ainsi nier le droit aux USA d'exister. Mais ceux qui font une demande analogue en Israël sont -- avec de bonnes raisons -- accusés de nier à Israël le droit à exister.

Le droit à l'"Etat juif" d'exister est effectivement incompatible avec les valeurs universalistes d'égalité et de démocratie. Israël est à cet égard similaire à l'Afrique du Sud de l'époque de l'Apartheid. De même qu'Israël accuse les avocats d'une égalité arabo-juive de vouloir l'abolition de l'Etat d'Israël, l'Afrique du Sud accusait les avocats d'une égalité blancs-noirs de vouloir abolir l'Etat Sud Africain. Les raisonnement est le même: l'égalité arabo-juive contredit l'idée que les juifs seuls sont l'autorité souveraine en Israël, comme l'égalité noirs-blancs contredisait la base Sud Africaine d'une souveraineté exclusivement blanche.

NON-DEMOCRATIQUE DES LE DEBUT

La première personne des temps modernes a avoir sérieusement appelé à la création d'un Etat juif fut Théodore Herzl, le fondateur de l'Organisation Sioniste Mondiale, qui écrivit "L'Etat Juif" en 1896. De son origine moderne dans le livre de Herzl, le concept d'Etat juif repose sur un rejet du principe démocratique selon lequel les Etats dérivent leur droit à diriger de l'assentiment des personnes vivant sur leur sol. [6] Herzl devait rejeter ce principe démocratique parce que les juifs n'étaient pas une majorité en Palestine [en fait moins de 10% de la population en 1896, ndt]. A la place, il affirma que l'Etat juif dérivait sa légitimité du besoin pour le peuple juif d'avoir un tuteur. C'est à dire qu'il souhaitait qu'un gouvernement en Palestine, où les juifs étaient une minorité parmi les arabes, soit le pouvoir souverain sur tous les habitants (juifs et arabes) et pourtant n'agisse qu'au nom des juifs dispersés de par le monde.

La rupture sioniste avec la démocratie a eu des conséquences désastreuses. De nos jours, les leaders israéliens sont dans une situation inconfortable. Ils ont besoin de la légitimité que donne l'image d'une démocratie. Mais la présence d'un grand nombre d'arabes dans Israël rend impossible pour Israël d'être à la fois une "Etat juif" (Etat de la souveraineté absolue des juifs) et une démocratie (souveraineté de tous les habitants). C'est une des raisons pour lesquelles les leaders Israéliens ne peuvent pas imaginer de permettre le retour des Palestiniens dans les foyers d'où ils furent chassés par les forces militaires en 1948.

DES JUIFS AVEC DES BUTS OPPOSES

L'idée d'un Etat juif a été soutenue historiquement par des juifs et par d'autres élites, mais pas par la plupart des juifs. En 1903, Théodore Herzl voyagea en Russie pour deux longues rencontres avec le ministre de l'intérieur du Tzar, Viatcheslav Plehve, considéré comme responsable des célèbres massacres des juifs de Kichinev. D'après le journal de Herzl (10 et 14 août), Plehve lui dit: "Vous n'avez pas à me justifier votre mouvement. Vous prêchez un convaincu...La création d'un Etat juif capable d'absorber plusieurs millions de juifs nous conviendrait pour le mieux." L'historien Israélien Yoram Hazony explique, "Comme Hertz l'avait longtemps suspecté, le gouvernement tsariste, qui gouvernait sept millions de juifs, dont beaucoup étaient de plus en plus attirés par le socialisme, était prédisposé à soutenir tout projet pouvant encourager l'émigration juive." [7]

Dans les années 1920 et 1930, de nombreux juifs furent impliqués dans des organisations ouvrières socialistes ou communistes qui luttaient pour des révolutions socialistes en Europe, pas pour l'émigration en Palestine. Par exemple, en 1938, Henrik Erlich, le leader du Bund - l'organisation de la classe ouvrière polonaise juive qui emporta largement le vote juif lors des dernières élections municipales avant l'invasion nazie -- déclarait: "Le sionisme a toujours été le frère siamois de l'antisémitisme et de toutes les formes du nationalisme chauvin." Les travailleurs juifs polonais rejetèrent les sionistes quand ils virent que les leaders sionistes passaient des arrangements avec les pires politiciens antisémites en Pologne pour l'évacuation des juifs Polonais vers la Palestine.

Contrairement aux sionistes, le Bund ne fit pas de demande de territoire. Ils luttèrent pour l'égalité pour les gens ordinaires en opposition avec la création d'un Etat juif. Ils croyaient dans le renforcement du mouvement syndical et dans l'unité entre travailleurs juifs et non-juifs en Pologne, et de 1939 à 1945 ils organisèrent une résistance clandestine aux nazis dans les ghettos, les camps de concentration et comme partisans dans les forêts. [8] À l'opposé du rôle du Bund pendant le génocide, l'Organisation Sioniste Mondiale (OSM, dirigée par Chaïm Weizmann) continua à collaborer avec les éléments les plus réactionnaires et antisémites de la société européenne pour obtenir des soutiens à son projet en Palestine. Par exemple:

Le chef du Comité de Sauvetage Sioniste de l'OSM à Budapest, Rudolf Kastner, devenu plus tard un membre éminent du gouvernement Israélien sous Ben Gourion, collabora avec les nazis. Kastner fut promu VIP par les nazis, et sans obligation de porter l'étoile jaune parce que, en échange du droit de prélever un petit nombre de juifs éduqués pour l'émigration en Palestine, il aida à pousser des milliers de juifs hongrois vers une mort sans résistance en faisant faire des fausses cartes postales venant "d'autres juifs" pour les convaincre que les trains des camps de la mort étaient seulement destinés à les "réinstaller" [9] Le leader sioniste Yitzhak Shamir, futur premier ministre d'Israël, proposa en 1941 une alliance avec les nazis contre la Grande Bretagne, écrivant aux chefs nazis: "En matière de concepts, nous nous identifions avec vous. Alors pourquoi ne pas collaborer? [10]

"UN ULSTER JUIF LOYAL"

Les élites britanniques et américaines qui soutinrent le Mandat en Palestine en 1922 puis la création d'Israël en 1948 n'avaient pas d'estime particulière pour les juifs; en fait elles furent plutôt satisfaites de rester sur la touche pendant que des millions de juifs étaient tués dans les camps de la mort pendant la 2eme guerre mondiale. Quand elles soutinrent le Mandat, leurs motivations ne furent pas altruistes mais politiques et stratégiques. Sir Ronald Storrs, le premier gouverneur de Jérusalem sous férule Britannique dans les années 20, expliqua que la valeur d'une souveraineté juive venait de ce qu'elle "constituait pour l'Angleterre un 'petit Ulster loyal juif' dans une mer d'arabisme potentiellement hostile."

Ainsi le rôle d'Israël au Moyen-Orient a t'il été dès sa gestation d'agir comme un paratonnerre pour les luttes de classe de la région, en provoquent la haine arabe et la guerre ethnique si bien que les régimes arabes -- tous assis sur une poudrière de travailleurs rebelles -- peuvent rester au pouvoir en dirigeant la haine populaire contre Israël. Pour permettre a ce conflit de durer, Israël doit être assez fort militairement pour repousser une quelconque attaque arabe, c'est pourquoi les USA arment Israël si lourdement. Les leaders du gouvernement et des grandes entreprises américaines ne pourraient jamais réunir un soutien public pour faire d'Israël un Etat de garnison hautement militarisé s'ils révélaient au peuple américain leur but réel: utiliser l'Etat juif pour contrôler la vaste population laborieuse et rebelle du Moyen Orient, et son pétrole. [11]

Pour fonctionner comme paratonnerre, Israël doit provoquer la haine des arabes; il ne peut pas vivre simplement comme un Etat où les juifs vivent et prospèrent en paix avec les arabes, de la manière, disons, des non-Mormons et des Mormons en Utah ou bien des juifs et des non-juifs aux USA. Ce doit être un Etat diviseur ethniquement, un Etat seulement "de et pour les juifs," un Etat dont l'existence même conduit les arabes hors de leur terre et incite à la guerre ethnique. Certains juifs l'ont vu dès le début de l'Etat d'Israël. Judah Magnes, premier Chancelier de l'Université Hébreu d'Israël, s'opposait à l'idée d'"Etat juif" parce que, comme il l'écrivait sans son journal en 1942, "Le slogan 'Etat juif' (ou communauté) est équivalent, en pratique, à une déclaration de guerre des juifs contre les arabes." [12] Du point de vue de l'élite, provoquer une guerre ethnique est précisément la fonction d'un Etat juif.

Les leaders des entreprises et du gouvernement se moquent du nombre de juifs tués dans la confrontation ethnique. Si bien que le juif moyen aux arrêts de bus, dans les restaurants et les dancings court maintenant plus de risques en Israël quand dans tout autre pays. C'est pourquoi, d'après un sondage de janvier 2002 commandé par Market Watch pour le quotidien Israélien Ma'ariv, 20 % des Israéliens adultes ont récemment envisagé de vivre dans un autre pays, et 12% des parents Israéliens voudraient voir leurs enfants grandir hors d'Israël. [13]

TRAITER L'ANTISEMITISME

Les sionistes affirment que le génocide des juifs démontre que ce qu'ils ont avancé en 1896 -- que les non-juifs sont congénitalement antisémites et que, pour survivre dans un monde hostile, les juifs ont besoin d'un Etat à eux. Mais l'histoire réelle de l'Holocauste ne démontre rien de tel. En fait la plupart des allemands étaient opposés à l'antisémitisme, et la classe ouvrière allemande a combattu les nazis dans la rue comme dans les urnes avant qu'Hitler se voie confier le pouvoir par les industriels et les aristocrates allemands, précisément pour écraser le mouvement ouvrier. Lors de la dernière élection libre (6 novembre 1932) avant la nomination de Hitler comme chancelier, les partis ouvriers allemands opposés à l'antisémitisme -- sociaux-démocrates et communistes -- dépassaient les nazis par 221 sièges contre 196 au Reichstag. La majorité des travailleurs allemands reconnaissaient l'antisémitisme pour ce qu'il était: une stratégie de l'élite allemande pour diviser et attaquer l'ensemble du peuple allemand.

L'Holocauste ne démontre pas que les non-juifs sont antisémites de manière innée, pas plus que l'esclavage ne démontre que les blancs sont des racistes anti-noirs innés. Si un tel préjugé inné était un fait, il serait difficile d'expliquer pourquoi tout incident raciste ou antisémite dans les villes américaines cause un tollé public de nos jours. La réponse appropriée au racisme et à l'antisémitisme est de renforcer l'égalité et la solidarité parmi les travailleurs de toutes races et nationalités, pas d'ériger des Etats ethniquement purs basés sur le tribalisme et des principes fondamentalement diviseurs. L'Holocauste n'est pas plus une raison pour les juifs d'avoir un Etat pour eux seuls que l'esclavage n'est une raison pour les Afro-américains d'avoir un pur "Etat noir" pour eux-mêmes. La plupart des survivants du génocide, quand ils eurent le choix entre aller en Israël [Palestine at the time -- js] ou aux Etats Unis, choisirent les Etats Unis parce qu'ils semblaient offrir ce qu'ils voulaient vraiment -- une société où les gens sont égaux devant la loi et où les juifs sont traités comme quiconque.

ET MAINTENANT?

Le concept même d'Etats ethniquement purs est diviseur et destiné à alimenter les conflits. La soi-disant "solution en deux Etats" au Proche-Orient, établir un Etat Palestinien pour contrebalancer un Etat juif -- est un piège conceptuel et politique qui empêche les travailleurs arabes et les juifs de s'unir autour de leurs valeurs et intérêts communs. La situation au Moyen-Orient ne peut pas être résolue dans ce cadre; il ne mène à rien sauf à plus de destruction, de haine et de contrôle élitiste. La solution n'est pas d'établir un autre Etat ethnique mais de désétablir ceux qui existent actuellement. Israël, comme les Etats pour musulmans seuls ou tout autre groupe ethnique, doivent cesser d'exister en tant qu'Etats basés sur l'apartheid et la domination ethnique. Ils doivent être remplacés par des démocraties laïques avec des droits égaux pour tous, sans égards de leurs origines, et tolérance égale pour toutes les religions. Ceci sera t'il accompli facilement? Certainement pas. Certaines des élites les plus puissantes du monde dépendent d'un conflit permanent au Moyen-Orient pour maintenir leur pouvoir. Etablir une démocratie réelle en Palestine demandera que les gens ordinaires se réunissent pour défaire les élites israéliennes, arabes et américaines. La démocratie réelle demandera une révolution. Est-ce possible? Oui, très difficilement. Est-ce nécessaire? Absolument, parce qu'il n'y a pas d'autre issue. La première étape est de penser le problème et sa solution différemment. Il est temps de s'y mettre.

Notes

1.Tom Segev, 1949 : The First Israelis, Free Press ; ISBN : 0029291801 ; (Février 1986)

2. http://www.jafi.org.il/mission/eval.htm

3. http://www.jcpa.org/dje/books/projren-ch1.htm

3b. "Letters to a deportee," publié originellement dans le Jerusalem Post, 14 janvier 1988, cité par René Backmann, "The Letter to Bashir," New Outlook, Mai 1988, 1988 http://www.vopj.org/personalnarr.htm )

4. Donna E. Arzt, professeur de droit, Université de Syracuse, ptrésentation le 7 décembre 1999 au Forum Sadate à Brookins, co-organisé par Richard Haass, vice-président et directoeur du Foreign Policy Studies à l'institution Brookings, et par Shibley Telhami, de la Chaire Anouar El-Sadate pour la Paix et le Développement à l'Université du Maryland. http://www.bsos.umd.edu/sadat/publications/Forum/12-7-99.htm

5. Alexander Safian, directeur associé et directer des recherches au comité Pro-Israël pour la Justesse des rapports sur le Moyen Orient en Amérique (CAMERA), une organisaton de surveillance des médias basée à Boston : Les arabes peuvent t'ils acheter de la terre en Israël?

http://www.meforum.org/meq/dec97/safian.shtml

6. Theodor Herzl, The Jewish State, Harry Zohn, trans. (New York : Herzl Press, 1970), pp. 69, 92-3. Cité par Hazony.

7. Yoram Hazony, The Jewish State : The Struggle for Israel's Soul, Basic Books, a New Republic Book, USA, 2001, pp.136-7

8. David Rosenberg, In Defiance of History, http://www.redpepper.org.uk/intarch/xbund.html

9. Ben Hecht, Perfidy, Milah Press (Jerusalem, New London) ; ISBN : 0964688638 ; (Avril 1997)

10. David Yisraeli : "Le probleme palestinien dans la politique allemande, de 1889-1945", appendice 11. Voir aussi Lenni Brenner, Zionism in the Age of Dictators, http://www.marxists.de/middleast/brenner/ch26.htm , notant que l'organisation de Shamir (NMO) souligna que "Le NMO est lié étroitement aux mouvements totalitaires européens par son idéologie et sa structure."

11. Lenni Brenner, Zionism in the Age of Dictators, http://www.marxists.de/middleast/brenner/ch08.htm , citant Ronald Storrs, Orientations, p.405.

12. Yoram Hazony, op. cit. p. 248

13. "Escaping the Hell of the Holy Land," par Sylvana Foa dans The Village Voice, Février 13-19, 2002, http://villagevoice.com/issues/0207/foa.php

[Traduction: JPB, http://www.toulouse-palestine.org/doc/bulletin/021113.html#8]

[The English version has been expanded to include the following paragraph, not yet translated:

Section 7A(1) of the Basic Law of Israel explicitly prevents Israeli citizens – Arab or Jewish – from using the "democratic" system of Israeli elections to challenge the inferior status of Arabs under the law; it restricts who can run for political office with this language: "A candidates' list shall not participate in elections to the Knesset if among its goals or deeds, either expressly or impliedly, are one of the following: (1) The negation of the existence of the State of Israel as the State of the Jewish People. …" In a 1989 Israeli Supreme Court ruling (reported in the 1991 Israel Law Review, Vol. 25, p. 219, published by the Faculty of Law at the Hebrew University of Jerusalem) Justice S. Levine, speaking for the majority, ruled that this law meant that a political party could not run candidates if it intended to achieve the cancellation of one of the fundamental tenets of the State – namely "the existence of a Jewish majority, the granting of preference to Jews in matters of immigration, and the existence of close and reciprocal relations between the State and the Jews of the Diaspora." --js]

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John Spritzler is the author of The People As Enemy: The Leaders' Hidden Agenda In World War II, and a Research Scientist at the Harvard School of Public Health.

 

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